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Subject: Re: PC: l'aile québécoise fait bande à part |
Plusieurs orientations du parti sont rejetées
Québec -- Les débats s'annoncent musclés chez les militants du Parti conservateur du Canada dans les prochains mois. En prenant des positions qui vont à l'opposé des orientations défendues par le parti, l'aile québécoise du PC a affiché ses couleurs en fin de semaine, au risque bien évident de choquer les militants du reste du pays.
Réunis à Québec samedi dans le but d'adopter une vision commune qui sera défendue au grand congrès national d'orientation en mars prochain à Montréal, les militants québécois du Parti conservateur n'ont pas hésité à défier les positions adoptées par le parti dans le passé, notamment sur les jeunes contrevenants, l'environnement, le développement industriel, la procréation assistée, la diversité culturelle, la concentration des médias et une réforme du fédéralisme. Des dossiers souvent explosifs qui provoqueront assurément des étincelles, particulièrement dans l'ouest du pays.
Le sénateur Pierre Claude Nolin, l'une des figures de proue de la relance du Parti conservateur au Québec, n'a pas caché que les positions adoptées en fin de semaine allaient en «préoccuper certains» ailleurs au pays. «On a compris que des idées claires et limpides pour nous n'étaient pas toujours aussi claires ailleurs et qu'il fallait faire savoir nos positions. Il va falloir s'asseoir et se parler», a-t-il dit au Devoir hier, une fois la poussière retombée.
Les questions de l'avortement, de la procréation assistée et des jeunes contrevenants, entre autres sujets, ont clairement démontré la fracture entre le Québec et l'ouest du pays. «Il va y avoir des débats forts sur ça en mars, c'est sûr, on ne peut pas passer à côté, souligne Pierre Claude Nolin. Mais si on croit aux valeurs de tolérance et de compassion, il faut s'arrêter à ces enjeux.»
Visiblement encore blessés par les dérapages de la dernière compagne électorale, les militants conservateurs du Québec ont adopté une résolution soulignant qu'«un gouvernement conservateur n'a pas l'intention de rouvrir le débat sur la question entourant l'avortement et favorisera le maintien du statu quo sur la question».
Un autre amendement aux orientations du Parti concerne les jeunes contrevenants qui sont jugés comme des adultes dans le cas de crimes graves. Un non-sens pour les militants québécois, qui font ainsi écho au tollé de protestations qui avait envahi le Québec lors de la mise en place de cette loi. L'amendement demande que les jeunes contrevenants soient jugés comme des adultes à partir de 16 ans et non pas de 14 ans. «Nous, on croit que parachuter un jeune dans le monde des adultes à 14 ans, c'est une garantie qu'il va devenir un criminel toute sa vie», explique Pierre Claude Nolin.
Même position plus progressiste sur la procréation assistée. Alors que le Parti conservateur propose dans son énoncé original de l'interdire pendant quelques années pour cause de préoccupations «éthiques et scientifiques», l'aile du Québec préfère «ne pas interférer avec l'avancement éthique de la science moderne» et estime que l'embargo est inutile, même si on veut encadrer la pratique.
Les militants du reste du pays vont aussi faire un bond en voyant que l'aile du Québec veut se lancer dans une réforme en profondeur du fédéralisme, notamment sur la place de la province dans le Canada. La proposition qui devra être débattue en mars se lit comme suit : «Un gouvernement conservateur étudiera la possibilité de réformer le fédéralisme canadien en considérant qu'il faut solidifier la position du Québec au sein de la fédération canadienne, celui-ci n'ayant jamais signé la Loi constitutionnelle de 1982.» Pour faire passer la pilule, il a été ajouté : «Il faut apaiser le sentiment d'aliénation des citoyens de l'ouest du pays, et il est important de construire un partenariat à long terme avec les peuples autochtones.»
«Ce ne sera pas populaire comme position, mais il faut en parler et réfléchir à une réforme du fédéralisme, tranche Pierre Claude Nolin. Toutes les choses dans cet amendement sont vraies.»
Aide à Bombardier
Sur le plan du développement économique, l'aile québécoise nage carrément à contre-courant. Ainsi, elle a modifié complètement le passage sur la restriction des subventions aux entreprises, jugeant que le contexte mondial ne permettait pas de se baser sur des dogmes. Bombardier aurait donc droit à des subventions, contrairement à la position du PC à la dernière élection. «Il faut savoir lire entre les lignes, il faut être pragmatique, affirme Pierre Claude Nolin. On ne peut pas adopter une stratégie économique basée sur des théories, alors que la réalité n'est pas comme ça.»
Les militants du Québec ont également adressé une fin de non-recevoir à la proposition de l'exécutif national voulant laisser libre cours à la propriété étrangère dans les médias, les télécommunications et l'aviation. L'aile québécoise veut au contraire qu'un gouvernement conservateur s'attaque au phénomène de la concentration des médias, qui empêche une saine diversité d'information, selon eux.
Alors que la question culturelle était à peu près inexistante dans la plate-forme conservatrice en juin dernier, les militants du Québec ajoutent l'importance de la diversité culturelle à la future orientation du Parti. L'environnement tient également le haut du pavé avec de nombreux ajouts, et ce, même si Stephen Harper a affirmé en entrevue au Devoir, samedi dernier, que le Protocole de Kyoto ne serait jamais appliqué par un gouvernement conservateur.
Les militants du Québec ont toutefois maintenu certaines positions chères au parti, surtout dans l'ouest du pays, notamment en abolissant le Registre des armes à feu, un sujet sensible au Québec. L'élection du Sénat et une réflexion sur la réforme électorale ont aussi été adoptées, tout comme une série de mesures pour favoriser l'aide aux étudiants postsecondaires.
Il reste que, en général, les 250 militants des quatre coins de la province réunis à Québec lancent «un énorme défi au reste du pays», comme l'affirmait un militant. Comment l'exécutif national prend-il ces nombreuses positions à contre-courant ? «C'est très positif, au total, signal l'attaché de presse de Stephen Harper, Dimitri Soudas. Ce n'est pas parce qu'il y a des divergences d'opinion que le parti est divisé. Ça démontre que le parti est vivant.»
Toutefois, bien conscient de la commotion possible chez les militants conservateurs dans le reste du Canada, il prend soin d'ajouter que les amendements adoptés en fin de semaine ne sont que la vision d'une des provinces et que le débat se fera en mars à Montréal.
Ce sera alors à l'aile du Québec de convaincre le reste du pays du bien-fondé de ses propositions. «Il faudra que les militants du Québec convainquent leurs homologues des autres provinces que ce sont des bonnes idées et que ça doit être la position officielle du parti», affirme Dimitri Soudas.
Alec Castonguay
Le Devoir du lundi 29 novembre 2004
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